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Dans le paysage de la photographie contemporaine, Jean-François Joly occupe une place singulière et remarquable. Mettre sur le devant de la scène les oubliés de la société du spectacle, mais en refusant justement les commodités du spectaculaire, telle est la tâche qu'il s'est assigné et qu'il poursuit sans relâche depuis des années, en photographiant les membres de communautés d'exclus, à Nanterre, Moscou, au Caire ou en Roumanie. Il apporte à l'exécution du portrait de ces personnes rejetées tout en bas de l'échelle sociale le soin et le talent que les artistes consacrent d'ordinaire aux portraits des grands de ce monde. Mais il le fait sobrement, bannissant les effets, ne recourant qu'aux moyens strictement essentiels de la photographie : point de vue, lumière, cadrage, format du négatif. Son savoir faire, sa compétence technique de professionnel, Jean-François Joly les mobilise pour exprimer l'intensité et la richesse de la relation qu'il a su établir avec la personne photographiée. C'est cette relation qui fait la valeur de ses portraits. L'usage systématique du Polaroïd – seul moyen de remettre immédiatement au modèle un exemplaire de sa photo – dit bien le prix que Jean-François Joly attache à cette relation, et du caractère égalitaire et respectueux qu'il entend lui donner.

 

Chaque personne ainsi photographiée retrouve une présence, une dignité, une aura dont le fonctionnement de la machine sociale l'avait privé. Elle n'est plus réductible à son étiquette d'exclu (SDF, sans-papiers, chômeur, gitan, etc.) mais retrouve son caractère unique d'individu membre d'une communauté. Non seulement, l'identité n'est plus confondue avec le parcours, mais elle est libérée du carcan des marquages sociaux.

 

Imperturbablement, Jean-François Joly édifie son œuvre de compassion, d'attention à l'autre. Sereinement et fermement, il retourne contre elle les armes créées par la société pour communiquer, promouvoir les uns, exclure les autres; il démonte les trompe-l'œil et les tours de passe-passe qui utilisent la photographie pour faire croire que l'identité est une question de look. Son travail est la subversion même.

 

François Saint Pierre


Depuis le début des années 90, j’inscris l’Homme au cœur de mes préoccupations photographiques que ce soit pour des projets personnels, des commandes pour la presse ou des institutions.

Privilégiant le moyen et grand format dans ma pratique de photographie documentaire, je mène des projets à long terme «Naufragés de la ville» sur des personnes magirnalisées dans divers capitales ainsi que «Terre d’asile, terre d’exil, l’Europe Rom.» sur la place des Roms dans la construction européenne.

Mes travaux sont présents dans des collections tant privées que publiques : Bibliothèque Nationale de France, Cité nationale de l’histoire de l’immigration, Centre National de l’Audiovisuel du Grand Duché du Luxembourg, Musée de l’Elysée de Lausanne.

“Naufragés de la ville” publié en 1994 par Contrejour et “Résonances” publié en 2005 par La grange aux images ainsi que "Terres d'exil" publié en 2016 par Filigranes rassemblent l’ensemble de ces deux essais photographiques.

En 2009 le centre Méditerranéen de la Photographie publie “La Grande Barre”, portraits d’habitants d’un HLM de Bastia avant sa démolition. "Dignité" publié en 2010 par Textuel et Amnesty International à l'occasion de sa campagne Exigeons la dignité réalisée par 5 photographes dont mon enquête photographique sur la condition des Roms en Macédoine.